Jean-Marc Ceci



  • 210419

    22 mai 2019

    Rarement je me retrouve à lire un livre qu’on m’a offert le jour même ou le lendemain de son offrande. Jamais en réalité. On est toujours pris dans des vortex de lecture qui se chevauchent, ou qui s’interpénètrent, il y a des piles, réelles, fictives, des choses qui savent attendre des années avant d’être seulement touchées ou lues, parfois même on se perd en chemin et on oublie (pourquoi on a acheté tel livre, comment on a pu se dire un jour je le lirai). Mais là oui. Hier, S. m’a offert un livre, Monsieur Origami de Jean-Marc Ceci, alors que je n’étais même pas là pour le recevoir, mais c’est une autre histoire. Je l’ai lu ce matin, c’est un Folio assez joli, avec une couverture en relief, un beau papier bouffant. Ce n’est pas quelque chose que d’ordinaire je lirais, et ça n’a pas besoin d’être une bonne ou une mauvaise chose. J’imagine que c’est précisément à cela que servent les cadeaux : nous amener à faire (ici en l’occurrence à lire) ce que, seul en nous-même, nous n’aurions pas fait. Mais ce n’est pas de ça que je voulais parler. Dans ce livre, la première chose que j’ai remarquée en le feuilletant, c’est que la biographie de l’auteur (très succincte) intervient en cours de livre. Ainsi, l’ai-je constaté en revenant en arrière, que les pages liminaires, titres, copyright, ce genre de choses. Et n’était-ce pas une bonne idée, de secouer l’ordre des choses ? Mais ce n’est pas réellement de cela qu’il s’agit. En réalité, c’est une erreur lors de la fabrication du livre : ici, ce sont des cahiers de 32 pages qui sont collés ensemble. Mais le deuxième cahier, celui prévu par l’éditeur, n’est pas le deuxième cahier mais le premier à nouveau, qui se répète. D’où l’irruption des pages de titres et de copyright en cours de livre. Concrètement, de la page 33 à 64, nous avons à nouveau le cahier qui va de la page 1 à 32. Je ne suis pas le seul concerné, certaines personnes s’en plaignent sur Amazon. C’est donc tout un pan du livre qui manque, ainsi qu’une interrogation. Que fait-on, quand on est l’éditeur (ici Gallimard / Folio) quand ce genre de problème se produit ? Chez STAT, nous avions des protocoles à suivre et des obligations (légales), d’affichage notamment, mais c’était un autre contexte, rien à voir avec les livres, en l’occurrence c’était des produits neuf défectueux susceptibles de blesser, voire potentiellement de tuer des gens (je n’en dis pas plus). Là, les enjeux sont moindres. Mais tout de même. Y a-t-il eu une communication de faite à l’attention des libraires ? Ont-ils retourné en masse des stocks que j’imagine conséquents ? Ont-ils dû réimprimer de nouveaux exemplaires ? Ou bien ont-ils rentré la tête dans les épaules en espérant que personne ne s’en rende compte ? Quelle tête a fait l’auteur lorsqu’il a découvert l’erreur en feuilletant ses exemplaires (et d’ailleurs l’a-t-il fait) ? Voilà le genre de choses auxquelles je pense, mais aussi à une autre, nettement plus stimulante que tout ça : est-ce qu’on ne pourrait pas mettre des pages de titre ou de copyright en cours de livre et non plus au début ? Reste plus qu’à trouver le texte qui s’y prêterait. La ferme des mastodontes me fait, lui, penser à Tao Lin, mais en plus fun. À la différence prêt que Tao Lin me désespère complètement, et que La ferme des mastodontes me désespère juste un peu. Je ne sais pas si c’est une nuance importance, mais, enfin, c’est une nuance. De temps à autre, quoi que je lise, je m’arrête pour mesurer la lumière. On se stabilise à quelque chose comme 800 lux mais, la plupart du temps, il n’y a pas moyen de trouver du sens dans ces mesures, et en définitive cet objet, que j’ai acheté sur un coup de tête un jour, ne sert à rien. Quand je l’approche de mon corps, les lux baissent et tombent sous les 100 lux, ce qui semble vouloir dire que je n’émets strictement aucun éclat (et c’est une putain de bonne chose).