Aujourd’hui, l’algorithmie des plateformes dominantes (dont on fait mine d’apprendre qu’en France elles cumulent à elles seules pas loin de la moitié du traffic) cherche à me convaincre que quelqu’un dont le métier est de passer la même plage au tamis chaque jour pour en filtrer les déchets a le meilleur job du monde. L’autre jour, on me vendait la politique ultra-répressive et anti-gang de cet état d’Amérique centrale qui détruit des sépultures et menace de cesser de nourrir les détenus (...)

Quand l’une des premières tâches de ta journée est d’aller lire la grande interview de rentrée du président de la république en exercice dans Le point, qui plus est entrecoupée d’une pub pour un joaillier-horloger de luxe intitulée Dubaï (sauf que ça ne s’écrit pas pareil), c’est que ta vie a dû prendre un bien mauvais tournant. Cette chose que tout le monde me reproche d’avoir faite ? Oui, eh bien, si d’autres l’avaient faite avant moi, je n’aurais pas eu à la faire ! Quand ce n’est pas (...)

D’abord, j’ai cru que c’était de lointaines infrabasses. Mais c’était trop régulier pour ça. Et une machine à laver en essorage ne dure pas toute la nuit. Non, ça ressemblait plutôt au rotor d’un hélicoptère. C’est là que j’ai compris. C’est le bruit que fait ce genre de gros ventilateur en bois, fixé au plafond, dont on se dit en les voyant chez d’autres qu’ils sont sans doute plus écologiques que des systèmes de climatisation industriels, c’est bien. Mais enfin il faut bien les alimenter (...)

En l’espace de deux semaines, le taux de jour dans le ciel de 6 h est tombé à 0 %. Dans le train pour Paris je suis placé derrière une très grande femme avec de longs cheveux noirs qui se lève pour laisser passer sa voisine qui s’installe et qui, la première, ce faisant, répand son café chaud sur mes genoux. On ne peut pas dire que je réagisse bien, et elle se précipite pour me dire que ce n’est pas de sa faute à elle mais de celle de sa voisine qui, elle, fait celle qui n’a (...)

Il n’y a pas que les bureaux qui soient vacants. La ville, aussi, s’est vidée non de sa substance (d’ailleurs qu’est-ce, sa substance ? l’architecture ? le passé ?) mais de ses habitants. Tout le monde n’est pas parti. La misère et les bas salaires sont là. Un pompiste indépendant sort ses pneus à vendre sur le trottoir. Plus haut sur le boulevard, deux femmes se querellent près des conteneurs à ordures. Tu veux quoi ? T’auras rien. Plus haut encore, à l’approche de la rue de Londres, une (...)

Les camions ostensiblement roulent au biogaz : c’est peinturluré sur leurs flancs. Dans les allées du parc des vies de chiens se jouent. Hier, à la gare, j’ai vu un café-restaurant dont le nom est « Dépôt légal ». Ton gosse, c’est toi-même en pire, ou en mieux, dit quelqu’un. Mazette, c’est la roulette russe, répond l’autre. Mais c’est faux, le mot mazette n’a pas été prononcé. Si ça se trouve, aucun des autres mots non plus. Voilà ce que c’est que d’écrire. J’écris des quant à eux. Il y a (...)

Il fait de moins en moins jour, le lundi matin 6 h. Dans le métro un homme au look très années 90 compte fleurette à une femme, habillée elle-même selon les codes éculés de cette époque, preuve qu’ils se sont bien trouvés et, en vérité, l’un fait ses adieux à l’autre, devant un jeune homme qui porte un pantalon de survêtement sur lequel la marque a fait l’exploit de floquer six fois de suite son logo. Dans La fin des temps de Murakami, du moins dans sa traduction française, lorsque (...)

Naguère tu achetais ponctuellement des supports de stockage que tu renouvelais plus ou moins régulièrement, et dont la valeur était variable (cassette audio ou VHS, CD ou DVD recordables, etc.), lesquels étaient d’ailleurs plus ou moins pérennes. Aujourd’hui tu payes une rente à vie à des empires du cloud pour des espaces dont tu ignores et la localisation, et les lois qui les régissent, et même quels sont les fichiers qui sont en premier lieu hébergés sur ton compte. // Only when you have (...)

Même quand il ne pleut pas il pleut à cause de cette eau lourde qui suinte des arbres. Et après la pluie vient le vent. En passant dans les couloirs j’entends un cas d’école qui commence comme une blague : c’est l’histoire d’un Néo-zélandais avec un permis de travail croate, qui vit à Varsovie et qui souhaite pouvoir travailler en Norvège via un contrat de travail sous droit français, afin de traduire du chinois. Comment faire ? Je n’aurai pas le fin mot de l’histoire, s’il s’agit d’une (...)

Passé la nuit à m’imaginer prendre rendez-vous avec le Dr G. de la rue de Sèze que je voyais quand je bossais pas loin, chez STAT, pour qu’il m’arrête aujourd’hui et tant qu’à faire demain, qu’il me refasse une prescription de triptans et d’anti-inflammatoires, dont je n’ai pas usé depuis deux ans, et que j’en finisse avec cette chambre d’échos de la douleur, alors même que le Dr G. est bien sûr en congés ce jour, qu’il ne prend aucune carte (ni bleue ni vitale), qu’il était il y a plus de (...)