Il n’y a pas si longtemps, on m’a demandé à propos d’Unetelle pourquoi je la lisais. J’ai répondu spontannément « Elle vit. » Contrairement à moi, ai-je pensé, qui écris, d’accord, mais ne vis en rien. Cela, ce n’était pas compris dans ma réponse. C’était pensé. C’est pour cette raison également que je m’intéresse aux tortues. Elles vivent. Pour toucher à une telle longévité terrestre, elles hibernent peu ou prou le tiers de leur année. Ce qui devrait donner à réfléchir à celles et ceux qui cherchent à atteindre, via le transhumanisme, une immortalité de synthèse. Et s’il suffisait aux milliardaires de la tech d’hiberner quelques mois par an pour réaliser leur rêve, et par ailleurs nous foutre la paix ? Ce serait donnant-donnant. Ce qu’il y a de bien avec notre abominable époque, c’est qu’après des décennies à nous dire, mais comment les écrivains des années trente faisaient pour écrire comme si de rien n’était leur journal, sans trop refléter le gouffre vers lequel l’Histoire les amenait à sombrer ?, nous allons enfin le découvrir par nous-mêmes.