Bitorrent existe encore. C’est un objet du passé. Mais télécharger 16Go de données en moins de dix minutes, c’est un temps du présent, pour ne pas dire du futur, pas du passé. Pogacar tombe après avoir mal négocié un virage, dans le secteur pavé de Pont-Thibault, durant Paris - Roubaix : le temps d’écrire ces lignes, c’est déjà le passé. Pendant que c’était vécu, ç’a été brièvement le présent, un temps impossible à mesurer. Avant qu’on parvienne à tenter de le faire, le moment est déjà clos sur lui-même, littéralement révolu. Le monde qui est le nôtre est un monde d’images. Les images prennent de plus en plus de place. Les écrans qui nous les montrent sont de plus en plus amples, et de plus en plus denses : ils contiennent de plus en plus de pixels. Les images vieilles d’à peine vingt ans (qu’est-ce que vingt ans) sont déjà difficiles à regarder de nos jours, du simple fait que leur résolution est trop basse. On a plus de mal à regarder des vidéos produites en 2003 ou 2005 en 2025 que ceux qui n’ont connu que le technicolor à voir des films en noir et blanc. La couleur, on peut s’asseoir dessus mais le flou, c’est autre chose. Le flou, c’est le passé en propre.