C

Creep, Radiohead (Pablo Honey, 1993)

D. mon frère, frôler les murs de sa chambre à même les briques le long les doigts, vibrent les murs quand les guitares saturées là explosent et le refrain je suis un creep, oui je le suis, et remonter jusqu’à l’étage pour regagner celle qui était son ancienne chambre ("vous m’aviez promis oui promis qu’à quinze ans j’aurais ma chambre en bas", je suis resté en haut).

F

Femme libérée, Cookie Dingler (1984)

Minuscule m’endormir dans le lit minuscule du rez-de-chaussée, la maison s’appelle Moy, devant cérémonie d’ouverture des JO de Barcelone. Les gendarmes demanderont à mes parents : il est à vous ce taureau ? Un lapin, le deuxième, tout gris sous le buffet d’en bas. On aurait vu passer, par la fenêtre, sous l’orage, une boule de cristal. Le jour du grand départ tout inonde, les ruisseaux sont des fleuves, merde alors les vaches flottent.

H

Heroin, The Velvet Underground (The Velvet Underground and Nico, 1967)

Dans la voiture, l’ancienne, moi derrière, eux devant, défilent latéralement et Lozère et Cévennes (ou l’inverse) et c’est ici apprendre que Pantagruel, Gargantua, l’un ou l’autre ou les deux, ont dispersé des pierres et ont formé le paysage d’hier tel qu’il s’exhibe aujourd’hui : devant mes yeux. Plus loin pousser la route, et la bande-son de la route, car il faudra bientôt atteindre le sommet de ce mont là, et une fois au sommet s’accroupir dans les ruines pour se protéger du vent et extirper de ma poche gauche la voix numérisée de H. car y a bien que là qu’elle passe.

I

IOU, Metric (Old World Underground, Where Are You Now, 2003)

Feu ce webzine bref, "Reality", appelé réel, si prêt de le devenir et qui a disparu après deux, après trois numéros, comme il était venu, sous le code d’une page vierge appelé par la balise #FFFFFF.

I Will Possess your Heart, Death Cab for Cutie (Narrow Stairs, 2008)

Levé le chiffre cinq en tête, rouge le réveil qui tord les chiffres, les yeux mouchés dehors-dedans, courir pour attraper le bus en bas de la rue, après le coude, avant silo. Préparer à l’arrache de ces cours qu’on s’apprête à donner. Devant, derrière, les gamins du lycée à l’arrache qui terminent de revoir tous ces cours qu’ils subissent. Compter depuis le car dans les fossés ci-vus le nombre rouge de coquelicots, Lee’s cock is caught, abandonnés.

L

Les yeux au ciel, Alex Beaupain, Louis Garrel (Les Chansons d’Amour, 2007)

Revoir venir tomber, mais à l’envers tomber, oui du bas vers le haut, tous ces galets polis que je jette moi aussi, toujours au coin de la rue, au coin de la rue toujours, le court faux plat jusqu’à ce bout de la rue, celui qui tire si proche la porte de l’immeuble, et pousser oui cette porte, le soir l’appartement en larmes, matin le nouveau taf qui pleure, bientôt le mois d’octobre oui mais quand est-ce ?

Love of my life, Carlos Santana, Dave Matthews (Supernatural, 1999)

Partir sur les routes et partir, siège arrière à tribord, traversée familiale, partir d’ici point A, paternel au volant, jusque là-bas point B, sans pour autant suivre la Loire. L’océan une escale et que faire si le sable trahit ? Arrivé au point B une naissance, lettre J., dans mes bras quinze secondes, me voir à la troisième personne et hors moi-même, elle cousine. Sortie du dernier Fly, le trente-septième volume, celui où à la fin le héros disparaît mais qui sait, un jour, hors champ, reparaîtra.

M

Ma mémoire sale, Alex Beaupain, Louis Garrel (Les Chansons d’Amour, 2007)

Déclencher la chanson au panneau interdit, interdit de stationner, actionner les paroles en fonction des pavés, écouter la phrase pleure, je l’ai fait avant toi et ça ne sert à rien en passant sous la plaque celle en bois qui un jour a brûlé, monter lentement les marches pour que telle phrase plus rien n’est triste plus rien n’est grave puisse tomber avant dernier pallier, si j’ai ton corps comme un torrent de lave avant cette porte encore l’ouvrir.

My Funny Valentine, Nico (Camera Obscura, 1985)

Entasser dans la chambre pour combien de semaines des meubles de jardin bien blancs, anciennement blancs, plastique, anciennement neufs, et puis s’y mettre ici, à la table, au bureau, emmuré dans le dedans pendant que l’été là défile, juste derrière les fenêtres. Taper sur le clavier les noms, les âges, l’histoire de ces petits mecs censés devenir des stars, des chanteurs pop, avant de découvrir, mais bien des mois plus tard, que toutes ces histoires là on n’était pas (encore) capable de les écrire.

P

Perfect Day, Lou Reed (Transformer, 1972)

E. j’ai encore la tête et les globes pleins et pleines de tarabiscutions de première année, et des mots qui me reviennent, oui, en allemand dans le texte, mais qu’ils s’envolent les vögelein et tant pis pour les falaises de marbre, je te laisse ok la place, et vois ton corps dans ma tête fixe qui disparaît pendant que le tram, travelling arrière, remonte le cours du centre-ville, moi là dedans et toi nulle part, car à compter de ce jour je sais que j’irai au bout de ma fac (et toi avec).

P

Pink Love, Blonde Redhead (Misery is a Butterfly, 2004)

Plonger les mains dans la vaisselle, celle où la veille tel lézard telle lézarde s’est tortillé(e), a traversé, s’est enfui(e) là, le tout en jouant des coudes pour que le fil d’Archos ne glisse pas sous le jet chaud devant, demain rentrer pour la toute première fois à Ithaque (42) et pour la première fois se dire : je viens d’ailleurs.

R

Rockollection 008, Laurent Voulzy (Recollection, 2008)

On n’est pas à trente-six mois prêts mais je reconnais le salon et toi et moi ensemble et seuls, proches de la mer qui souffle l’air des hier et du jour même. Ce que je te dis : qu’aucune quasi me rappelle à l’ordre leurs beaux souvenirs mais qu’aujourd’hui avec j’en graverais quelques dizaines d’autres neufs car rien qu’à se regarder sans même rien se dire on s’en fabrique combien de nouveaux souvenirs ? (moi je les compte à la tonne).

S

Self Destruction Final, Nine Inch Nails (Further Down The Spiral, 1995)

Si je me mets juste ça sur les tempes, à boucle et en fond, tu verras que j’étoufferai jusqu’au plus con des slogans d’asphalte que la foule elle gueulera. Et toi, toi tous, que je croyais pourtant connaître, en boucle et à fond, que tu puisses suivre la marche des semelles en rond sur le bitume, le vague des r’vendications, ça me dépasse ; ça me dépasse et ça me fout dans un trou plus bas que sol (j’y suis j’y reste).

S

Space Oddity, David Bowie (Space Oddity, 1969)

Attendre combien de temps attendre que l’ombre du corps de H. apparaisse sur le sol de la gare, laquelle la Montparnasse ou celle de Lyon plutôt, dans un train du Sud-Ouest bloqué depuis combien d’heures oui des heures, faire tourner la molette du Zillion, payer quelques euros à peine pour un journal de sans-abris car le petit corps du mec qui les propose je pourrais payer pour et, non, je ne sais pas encore qui est qui et si celui-ci est, ou non, un junky.

T

The Libertine, Patrick Wolf (Wind in the Wires, 2005)

Marcher combien de temps marcher le long des rues surtout sans plan ni sens ni organisation mentale des mouvements, des circuits. Chercher combien de temps chercher sur les façades, les murs, stigmates d’un temps qui ne l’est plus. En lieu et place d’un personnage fictif, fictif mais mort-né, mort-né mais fictif, photographier de l’oeil, l’index, toutes les pubs peintes restées ancrées à même le mur, en surbrillance. Retenir les pulsions qui me plaquent le mot "fuir" aux tempes et même aux lèvres (Run / the risk / of being / free). Je vois briller, rue parallèle, vue circulaire, les guirlandes de Noël au mois d’août et le gui.

Eternellement à suivre...


mardi 13 décembre 2011 - vendredi 26 avril 2024

Où l’on archive, par pur souci de restitution mémorielle, tous les morceaux enfouis appelant entre leurs griffes des souvenirs coincés. La musique est une éponge, je l’ai écrit très loin de moi. Ces chansons sont dans ma moelle. Cette page un abécédaire inépuisable. Fort heureusement inépuisable.

Première publication le 24 août 2011




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Guillaume Vissac est né dans la Loire un peu après Tchernobyl. Éditeur pour publie.net entre 2015 et 2022, fondateur en 2023 du laboratoire d’édition Bakélite, il mène également ses propres chantiers d’écriture et de traduction, principalement en ligne (mais pas que).

Livres : Vers Velvet (Pou, Histoires pédées, 2020). Accident de personne (Othello, réédition 2018) · Le Chien du mariage (traduction du recueil d'Amy Hempel, Cambourakis, 2018) · Mondeling (avec Junkuu Nishimura, publie.net, 2015) · Coup de tête (publie.net, 2013, réédité en 2017) · Accident de personne (publie.net, 2011) · Livre des peurs primaires (publie.net, 2010) · Qu'est-ce qu'un logement (publie.net, 2010)