Les jeûneurs suspendent Michel par les aisselles, à l’aide de filins d’acier. Ils le calent un peu mieux sur sa planche de bois. Ils lui enlèvent sa veste, sa chemise. Un jeûneur joue avec la cravate, il la fait onduler comme un serpent dans le sable. Ils ont encore des images en tête, ils font preuve d’une créativité soudaine, d’une suite dans les idées qui les enchante, puis ils reviennent à eux, mornes, vides, sans pour autant en être contrariés. Dans ces périodes d’exaltation, les petites mousses vertes qui ont remplacé les dents sécrètent davantage de suc.

Clotilde Escalle, Les jeûneurs, Publie.net

À la recherche de quelque chose tout le jour, quelque chose que j’ai entendu, c’est quelque chose de musical, c’est quelque chose qui m’est tombé dessus, c’est quelque chose de liquide et d’égyptien, il y a de l’accordéon du piano ; c’est tout ce que je sais. Plus tard je chercherai aussi un autre son, c’est du piano tout seul, ça vient de je ne sais où, c’est Sally Whitwell qui le joue, ça s’appelle Russian Rag. Plus tard encore je retourne chez l’anthropophage pour qu’il répare mes yeux, ce sont des verres blancs, ils ne sont pas photovision, je les aurai demain, dit-il, les vrais photovision, en appelant quelqu’un qui doit être mon clone, mon clone d’une boîte d’optique, le SAV des verres foirés.