je me demande s’il y eut jamais dans l’histoire humaine des périodes durant lesquelles l’attention accordée aux personnes fut plus importante, plus portante, que l’attention accordée aux chiffres, aux nombres et aux comptages, quelles périodes ?

Marc Perrin, Spinoza in China, Dernier télégramme, p. 442

De retour au bureau noir et des piles de mails inversés qu’il faut remonter et puis lire, trier, supprimer, répondre, classer, taguer, etc. Puis des tableurs, des chiffres, des lignes, des couleurs, des formules basiques mais utiles. L’autre jour quelqu’un dit (je tairais son anonymat je ne linkerai rien) que pour en passer par une alternative au capitalisme il fallait en passer par les chiffres obligés du capitalisme, les chiffres et ses outils. Ce n’était pas exactement ça qu’il disait, ni comme ça qu’il le disait mais il l’a dit en substance. Ou, si c’est pas le cas, c’est ce que moi j’ai assimilé pendant que lui disait. Enfin je sais pas. Ça m’a toujours intéressé ces chiffres : pas en tant que chiffres mais en tant qu’instrument à distance de la réalité. Pas la réalité brute des chiffres, les chiffres sont toujours faux, tous mes chiffres chez STAT étaient faux, pendant plus de quatre ans ils l’étaient, même s’ils étaient bien l’incarnation la plus proche du réel qui pouvaient être. Je connais pas de meilleure médiation que ces chiffres, et l’interprétation qu’on tord ou qu’on tend de ces chiffres. J’avais peur du poids de tous ces mails au matin, pourtant je suis parti que quoi, quatre jours ? M’énerve parfois mais peu de choses. Des bribes. Du grésil. J’essaye de voir ce qui est beau dans l’immédiateté, c’est-à-dire que j’essaye de me désincarcérer, au fond, de l’immédiateté.